Lauréates en 2022 de l’appel à projets mode et métiers de la mode conçu par le ministère de la Culture, ces entreprises conjuguent notamment mode innovante et éco-responsabilité.

Ils sont maroquiniers, créateurs de vêtements et de chaussures, chefs d’ateliers de réparation ou encore horlogers. Leur point commun ? Une créativité enthousiaste alliée à un sens aigu des responsabilités, comme en témoignent les démarches innovantes qui placent le recyclage ou l’éco-responsabilité au cœur de leur production. Résultat : leurs entreprises représentant un large éventail de l’industrie de la mode ont été lauréates de l’appel à projets mode et métiers de la mode 2022 conçu par le ministère de la Culture pour accompagner le développement de projets numériques et éthiques dans ce domaine. Tour d’horizon de six d’entre eux.

Phi 1.618, une marque de haute-maroquinerie sous le signe du Nombre d’or

PHI 1.618, une marque de maroquinerie haut de gamme © Laura Bonnefous

« Le nombre d’or est la base de toutes mes créations », explique Juliette Angeletti, fondatrice de la belle maison de maroquinerie Phi 1.618, l’autre nom du nombre d’or, basée à Paris. « Il symbolise le rapport parfait, il est présent partout dans la nature, nos yeux sont habitués à cette harmonie », poursuit celui qui crée des modèles qui misent sur la longévité et l’intemporalité. Longévité et intemporalité dans les formes – il suffit de voir le sac en forme de coquille de nautile ou la ceinture emblématique de la maison, qui se noue comme la lettre « phi » en grec – autant que dans les matières ou la fabrication. Ce qui s’inscrit dans une démarche résolument éco-responsable : « Je puise ma matière cuir dans des stocks dormants, c’est-à-dire des stocks qui n’ont pas été utilisés par des maisons qui ont signé des contrats avec des tanneurs, précise Juliette Angeletti, je réalise les prototypes, puis tout est envoyé à fabrication dans deux ateliers, respectivement dans les régions de Cholet et de Tours. Enfin, les articles sont 100% made in France.

L’enjeu de la bourse, attribuée dans le cadre de l’appel à projets mode, est de « valoriser notre savoir-faire français à travers les outils numériques et optimiser la relation client ». Juliette Angeletti ambitionne donc de continuer à « filmer les artisans dans leurs ateliers et montrer leurs techniques ». Concernant le deuxième aspect, le créateur de Phi 1.618 souhaite s’adresser à chaque client de manière « plus personnelle », notamment par le biais de mailings ciblés.

Auffret Paris, la passion des montres haut-de-gamme

Auffret Paris, une jeune maison horlogère haut de gamme © Auffret Paris

« Nous sommes une jeune et petite entreprise », déclare Théo Auffret, créateur et président d’Auffret Paris SAS, fabricant de montres haut de gamme. Petite et jeune certes – elle compte trois salariés et entame sa troisième année d’activité – mais les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’entreprise a déjà bénéficié de plus d’une trentaine d’articles de presse dans les prestigieux magazines horlogers et produit près de 10’000 pièces dont 3000 d’entre eux à la main.

Un reportage dans la lignée de la passion de son jeune créateur, qui, grâce à la subvention de l’appel à projets, vient de racheter une vieille machine. « L’horloge moderne est faite comme elle était il y a cent ans, rien n’a changé, explique-t-il, travailler avec des objets anciens n’est pas une question de choix philosophiques, on s’adapte simplement dans le processus, ce sont toujours les mêmes gestes quand les instruments sont beaux, les gestes le sont aussi, les constructeurs de machines sont aussi appliqués que les horlogers ». Quelle est exactement cette nouvelle machine ? « C’est une perceuse de précision, une sorte de pointeur entre le compas et la perceuse, une machine de coulée robuste et solide, qui mesure 1,5 m de haut, principalement destinée à la fabrication de pièces de 3 cm de long. Le perçage permet de mesurer la distance au micron près Avant d’entrer en studio, il est restauré et agrandi à la règle numérique, ce qui en fait un objet hybride.

Eugène Riconneaus, une ligne de chaussure entièrement conçue à partir d’une matière recyclée

Eugène Riconneus, créateur de chaussures © ER

« De l’extérieur, on pourrait croire que c’est un tournant, mais en réalité c’est la suite naturelle de l’histoire », assure Eugène Riconneaux, fabricant de chaussures et de baskets en son nom, qui prépare une ligne de chaussures entièrement composées de déchets marins : Huîtres, filets de pêche et algues. « J’ai commencé par réparer des chaussures de skate, mon aventure dans la chaussure est partie de là, puis j’ai créé ma première collection à partir de chutes de cuir des grandes maisons, explique le créateur. Depuis je suis revenu sur le littoral en Charente-Être maritime où j’ai grandi , j’ai progressivement intégré les déchets marins, plastiques et organiques, dans mes collectes.

Une démarche qui trouve donc aujourd’hui son apogée avec le lancement anticipé de cette nouvelle ligne au logo ER. « J’ai créé mon propre matériel », se demande celui qui se défend fermement pour l’environnement et le reste d’un trop grand esprit de sérieux. « Je ne veux pas parler de ces choses comme si cela allait changer le monde. Je l’ai résolument abordé par l’art, comme une œuvre, un ready-made ». Les premières créations, des baskets unisexes, seront présentées à Paris en 2023, lors de la prochaine Fashion Week, et les précommandes seront livrées jusqu’à fin février. Quant aux chaussures femme, qui devraient voir le jour en milieu d’année, Eugène Riconneaux en garde jalousement le secret !

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Les Réparables, un atelier qui met son savoir-faire au service de la réparation textile

Les Réparables, magasin de vêtements © Les Réparables

Les objectifs de la création des Réparables, atelier de réparation textile vendéen, sont « multiples », souligne spontanément sa fondatrice Blandine Barré. Le premier est de participer à un nouveau mode de consommation, « d’être en punition avec la mode jetable et bon marché » ; Mettre la réparation au cœur des thématiques est un deuxième objectif : « Le vêtement est synonyme du look que l’on veut se donner, la réparation est comme une seconde peau. Le message que l’on veut faire passer est que peut-être qu’il y a plus qu’il est intéressant d’acheter. un vêtement de qualité, certes plus cher au départ, puis à entretenir » ; le troisième est politique, l’entreprise veut aussi jouer pleinement son rôle dans la promotion des enjeux environnementaux et sociaux, comme en témoigne son adhésion au collectif 1 % pour le planet Ce dernier est de « remettre ce métier et son savoir-faire sur le devant de la scène ».

Pour tous les clients, « personnes, entreprises ou marques », un même modus operandi : la plateforme digitale. « Le numérique a pris une place importante dans l’outil. Notre calculateur en ligne estime le coût de la réparation. La personne a une réponse immédiate et reste libre de faire ce qu’elle veut. » La participation à des salons, l’enrichissement du contenu du site et la publication de publireportages ont déjà permis à l’entreprise de mieux se faire connaître. L’enjeu aujourd’hui est d’aller encore plus loin, un objectif auquel contribue la contribution du ministère. « Grâce à l’aide, nous mettrons en ligne des données techniques pour les personnes qui souhaitent des informations plus précises, nous prévoyons également de faire une campagne auprès de certains médias », conclut Blandine Barré.

Hopaal, une marque pionnière engagée dans la mode éthique

La veste Atlas de la marque Hopaal © Hopaal

Lancée en 2017, basée à Biarritz, Hopaal est une marque pionnière de la mode éthique en France, spécialisée dans les vêtements recyclés fabriqués localement pour hommes et femmes. En 2019, elle développe des boutons recyclés issus de filets de pêche, et en 2020, elle lance DemocraTee, le premier t-shirt recyclé et fabriqué en France vendu localement. Depuis 2022, la marque a souhaité donner un écho plus large à son message. « L’année 2022 a été intense pour Hopaal, reconnaît Clément Maulavé, son président, nous avons effectivement entamé un repositionnement de la marque, plus pointu et plus engagé, qui sera effectif en 2023, nous nous tournons déjà vers l’avenir. Nous avons également changé de bureau. : Nous restons à Biarritz mais sommes maintenant à quelques mètres de la Côte des Basques ».

Un repositionnement dont la veste Atlas – imperméable, 100% recyclée, fonctionnelle et fabriquée avec des cartouches zéro déchet – actuellement à l’étude, qui est soutenue par le ministère de la Culture, devrait être emblématique. « Les travaux sur la veste Atlas avancent bien, indique Clément Maulavé, notamment en termes de matière et de style. Nous souhaitons la concrétiser d’ici l’été et la commercialiser d’ici fin 2023 ».

Manufacture de Clisson, la renaissance d’une entreprise familiale

Manufacture de Clisson, la renaissance d’une entreprise familiale © Manufacture de Clisson

« Avec la manufacture Clisson sous la houlette de Manon Cornué, on est typiquement dans le scénario d’une entreprise familiale reprise par la jeune génération », constate Aude Vuillier, chef de projet design et mode au ministère de la Culture, à propos de cet atelier de confection à Loire-Atlantique spécialisée dans le travail des matières douces, mousseline, tulle, satin de soie.

C’est à Saint-Nazaire que s’implantent les premiers établissements Lethu en 1928, alors spécialisés en orthopédie. Installées à Clisson en 1941, elles ajoutent la corseterie à leur métier en 1954, se spécialisent dans les vêtements de nuit sous la marque Régence en 1965, puis continuent d’élargir la gamme des produits fabriqués. Un savoir-faire éprouvé, qui ne manque que de « pleine reconnaissance », selon Aude Vuillier, auquel le ministère de la Culture travaille à travers une subvention qui devrait aider au « développement de l’entreprise », notamment via le rachat de Vetigraph automatiquement.