Dans un arrêt rendu en décembre dernier, la CJUE (Cour de l’Union européenne) a statué que les travailleurs ne devraient pas avoir à financer eux-mêmes leur équipement optique s’ils ont besoin d’une correction de la vue pour exercer leurs fonctions professionnelles.
En 2021, les tribunaux roumains ont engagé une procédure contre la Cour de justice de l’UE pour l’interprétation d’une disposition de la réglementation européenne concernant les « exigences minimales de santé et de sécurité liées au travail sur les équipements d’affichage ». Cette demande a été introduite dans le cadre d’un litige entre un salarié roumain et son employeur, qui a refusé de lui rembourser le coût d’achat de lunettes non prises en charge par le système de santé roumain.
L’article 9 de la directive 90/270/CEE du Conseil (du 29 mai 1990) stipule que les travailleurs tenus d’utiliser un écran doivent subir un examen ophtalmologique avant leur prise de fonction et à intervalles réguliers par la suite. Si nécessaire, « et si les dispositifs correcteurs habituels ne peuvent être utilisés, les travailleurs doivent être équipés de dispositifs correcteurs spécifiques en fonction du travail à effectuer », précise le texte. Le cas échéant, cela ne devrait en aucun cas signifier une charge financière supplémentaire pour les travailleurs.
Pour la CJUE, les « dispositifs correcteurs spéciaux » répertoriés incluent « les lunettes de vue spécifiquement conçues pour corriger et prévenir les troubles de la vision liés aux travaux impliquant des équipements d’affichage ». De plus, ils ne sont « pas limités aux appareils utilisés exclusivement dans un cadre professionnel ». Dans son arrêt du 22 décembre 2022, le tribunal considère en outre que l’obligation de fournir aux travailleurs cet équipement « peut être remplie soit par la mise à disposition directe dudit dispositif » par l’employeur, soit par le remboursement des frais engagés, mais « pas par le paiement d’une prime salariale générale au travailleur ».
Quel impact pour cette jurisprudence ?
Si cet arrêt de la Cour de justice de l’UE va aider la justice roumaine à résoudre le litige en question, peut-il aussi avoir des conséquences en France ? Oui, mais seulement dans des cas particuliers. A savoir, la directive stipule que « la protection des yeux et de la vue des travailleurs peut faire partie du système national de santé ». Cela signifie que si le pays a mis en place un système permettant une couverture complète de l’équipement optique de ses citoyens, l’employeur n’est pas obligé de financer lui-même ces produits. C’est comme ça en France avec 100% santé. Toutefois, si les lunettes ne peuvent être restituées au salarié pour une raison ou une autre, cette jurisprudence peut servir d’argument dans le cadre d’un éventuel litige. Il convient également de noter que ces problèmes juridiques ne concernent pas les lunettes de sécurité, qui doivent être financées par l’employeur dans tous les cas.