Olivier Rousteing, Madonna, Kim Kardashian… Depuis un demi-siècle, la chanteuse inspire des générations d’artistes et de créateurs. Vous aimez les paillettes ? Itinéraire d’une icône de la mode sexy, strassée et sensationnelle !

« Cher est la femme pionnière par excellence : dans la mode, dans la musique, dans le cinéma. Elle est tout! Olivier Rousteing, le prolifique directeur artistique de Balmain, a l’enthousiasme d’un amoureux : en septembre, il a convoqué la reine des icônes de la mode, la mythique Cher, pour son défilé printemps-été 2023 et le lancement de son nouveau sac Blaze. « Ils descendent tous d’elle », s’exclame-t-il. Il est le premier à briser et à briser encore les barrières vestimentaires autant que sexuelles, qu’on adore tant aux Etats-Unis qu’en France. C’est un mythe ! Et son mythe est plus vivant que jamais ! Cher, de son vrai nom Cherilyn Sarkisian La Pierre, femme aux millions de looks et aux milliers de perruques, femme Pocahontas, femme glamour Studio 54, femme homme, femme d’ailleurs, femme caméléon, femme bionique, est plus inspirante que jamais. Il suffit de regarder Instagram – tout le monde poste régulièrement une photo de Cher. Depuis qu’on l’a découverte à 19 ans sur « I Got You Babe », coiffée et brushée comme Sonny (son partenaire de chant et ex-mari), elle a traversé les époques tant un mood board se compose : folk, pop, disco, danse. , camp, queer, drag-queen… Des générations de stylistes le remercient. Et Madonna, Lady Gaga, Dua Lipa et Zendaya existeraient-elles si Cher n’avait pas eu le culot de montrer son nombril sur le tapis rouge du Met, faisant se rencontrer les arbitres du style il y a cinquante ans ? Rock star de la mode chère? En voyant fans, journalistes, célébrités, stylistes et influenceurs crier « Strong Enough » au défilé Balmain, on est vite convaincu.

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Une icône mode                

« Elle ressemblait à Cléopâtre quand elle apparaissait en déesse ! » s’exclame Loïc Prigent, journaliste et documentariste. Surtout, elle réussit l’impossible : réconcilier tous les publics. « Aujourd’hui, nous sommes submergés de références stylistiques, d’exemples à suivre. Mais Cher est mondial. Qui peut prétendre qu’elle a tout essayé en restant fidèle à elle-même ? C’est une femme idéale qui est ce qu’elle a décidé d’être, sans jamais être bourgeoise », commente Laurent Dombrowicz, styliste et consultant mode de Mylène Farmer. Cher, queer par excellence femme, elle est plus que jamais d’actualité à une époque sans frontières. « C’est une icône gay, une icône camp. Elle s’est affranchie des contingences de genre avant l’heure, avec sa féminité alternative mêlant références ultrasexuelles et androgynes. Cher a toujours une longueur d’avance. » Ses silhouettes sont considérées comme l’essence même du style drag queen, pourtant nous vivons à une époque où cette esthétique s’invite, magnifiée, entre fascination et curiosité. elle est la mère spirituelle ! il continue

Son dressing est un univers en soi. On le doit à Bob Mackie, créateur burlesque et victime de la mode, très porté sur les paillettes et les plumes (référence : la robe « Happy Birthday Mr. President » de Marilyn Monroe). Cher en robe nude, Cher en icône du Christ, Cher en princesse égyptienne, Cher en marquise Casati, Cher en pirate ou Cher en combinaison et cuissardes argentées – c’est lui, Bob Mackie. Il a su créer une icône capable de changer dix fois d’apparence en un seul concert, tout en restant légitime quatre décennies plus tard. Dans le bon travail* consacré à sa carrière, Cher a le dernier mot. « Je me suis promis : je te couvrirai de perles. Il y a eu des milliards. Dès 1971, date de leur rencontre, il lui invente des robes qui atteindront le rang de classiques absolus. Les magazines – de « Vogue » à ELLE, en passant par « Harper’s Bazaar » – regorgent toujours de looks inspirés de ceux de la diva. De plus, Diana Vreeland, papesse du « Vogue » américain à l’époque, ne s’était pas trompée et avait prédit son destin d’égérie dès le départ. Elle adorait, disait-elle, « sa tête pointue ». Et quand une telle fée atterrit dans votre berceau, c’est que vous êtes destiné à devenir une légende. Autre figure tutélaire, le photographe Richard Avedon, qui l’immortalise en 1966. Neuf ans et mille rencontres plus tard, Cher reproduira le même shooting pour la couverture de « Time » : « Chermania » est alors à son apogée. Tout est dans son style, outrancier et glamour.

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Un style inimitable 

« Ce que les gens aiment chez elle, explique le styliste des célébrités Jonathan Huguet, c’est que son look est spectaculaire, surprenant et séduisant, voire déroutant. Sa maîtrise de la « masse » y est pour beaucoup, qu’elle porte des plumes, des strass, des strings apparents ou une tenue de bondage. Ces éléments croquants questionnent le bon et le mauvais goût. Au fil des années, il a conservé son côté rebelle. La même chose qui lui a donné la force de se séparer de son mari, Sonny : « Pourquoi as-tu besoin d’un homme ? L’homme c’est moi ! déclare-t-il en 1996 dans une interview restée célèbre. Est-ce son féminisme qui la rend si actuelle ? « On m’a dit un nombre incalculable de fois que mes tenues étaient trop folles, trop sexy, trop décomplexées. Les critiques se sont intensifiées en vieillissant. Est-ce que je les ai écoutées ? Pas une seule fois », a-t-elle récemment confié à la presse américaine. Bien sûr, certains diront qu’il y a eu quelques fautes de goût. Mais personne ne peut égaler ses records d’enchères. En 2006, environ sept cents de ses vêtements ont rapporté 3,5 millions de dollars. En 2021, son look punk rock qu’elle portait sur « If I Could Turn Back Time » s’est vendu 115 200 $. « C’est parce que son style pop inimitable rappelle Elvis Presley. Ou David Bowie », explique Jonathan Huguet. Tous les trois partagent leur illimité. Ainsi la chirurgie esthétique, qu’il pratique à partir des années 90, devient un objet de pop art. « Je suis un interprète, je vieillis devant les caméras, devant un public qui exige la perfection. Je n’aime pas vieillir et je le dis. Si je veux me faire poser des implants mammaires dans le dos, c’est à moi de décider », a-t-elle déclaré en 2010.

© Archives Michael Ochs/Getty Images

Cher est capable de combler les fossés entre la musique et le cinéma, les tapis rouges et les sitcoms, 100 millions de disques vendus, un Oscar (1988) et un prix de la meilleure actrice à Cannes (1985). Moitié arménienne, moitié cherokee, elle fait partie de ces gens venus d’ailleurs qui rêvent d’un autre destin. Depuis son âge d’or, elle a été « assez forte » pour affronter des concurrentes du nom de Diana Ross, Barbra Streisand… à Madonna et Lady Gaga, qui se disputent avec elle le sceptre d’icône planétaire de la mode. » Et Kim Kardashian ! souligne Jonathan Huguet. Une Arménienne comme elle qui compte parmi ses égéries. « C’est bon de la retrouver, toujours inspirante. » J’adore ! Je vois des filles porter des choses que j’ai portées toute ma vie. Ils pensent que c’est nouveau. Ou ils ont vu une photo et ont eu le look », dit-il. Les brillantes campagnes publicitaires de Ugg (2022) et Marc Jacobs (2015) la font trôner en majesté sur un fauteuil. Oublions que la plus étrange des reines a 76 ans. Pas étonnant que le Victoria & L’Albert Museum de Londres l’expose dans « Diva » en juin. Tu penses »?

* « The Art of Bob Mackie », de Frank Vlastnik et Laura Ross (ed. Simon & Schuster).